Pourquoi le Kangourou porte-t-il ce nom ? Une exploration étymologique et culturelle

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Le kangourou est un animal emblématique de l’Australie, symbole de la faune unique de ce continent et de la richesse de sa biodiversité.

Mais pourquoi ce marsupial porte-t-il ce nom si singulier et comment est-il devenu un élément central de la culture australienne ?

Nous vous invitons à découvrir avec nous les origines étymologiques du terme « kangourou » et son évolution au fil du temps, ainsi que la place de cet animal dans les traditions et les représentations culturelles du pays des antipodes.

Les racines linguistiques du nom « kangourou »

Le nom « kangourou » trouve ses origines dans les langues aborigènes d’Australie, parlées par les peuples autochtones qui peuplaient ce continent depuis des millénaires avant l’arrivée des Européens. Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer l’étymologie de ce terme, qui a connu des transformations et des adaptations au fil du temps.

  1. La théorie de la langue guugu yimidhirr : La première hypothèse, et la plus communément admise, attribue l’origine du nom « kangourou » à la langue aborigène guugu yimidhirr, parlée par les populations de la région de Cooktown, dans l’actuel État du Queensland. Selon cette théorie, lorsque le capitaine britannique James Cook et son équipage débarquèrent en Australie en 1770, ils auraient rencontré des Aborigènes et leur auraient demandé le nom de cet animal sauteur qu’ils n’avaient jamais vu auparavant. Les autochtones auraient répondu « gangurru », qui signifie « kangourou » dans leur langue. Cook et ses hommes auraient alors repris ce terme en l’adaptant à la phonétique anglaise, donnant naissance au mot « kangaroo » qui serait ensuite passé en français sous la forme « kangourou ».
  2. La théorie du malentendu linguistique : Une autre hypothèse, moins répandue mais intéressante, suggère que le nom « kangourou » résulterait en réalité d’un malentendu entre les Européens et les Aborigènes. Selon cette version, lorsque Cook aurait demandé aux autochtones le nom de l’animal, ils auraient répondu « kangaroo », qui signifierait en réalité « je ne sais pas » ou « je ne comprends pas » dans leur langue. Les Européens auraient alors pris ce mot pour le nom de l’animal, ignorant qu’ils étaient en fait victimes d’une confusion linguistique.
  3. La théorie de l’influence des autres langues aborigènes : Enfin, une troisième hypothèse propose que le nom « kangourou » pourrait être issu de la fusion de plusieurs termes issus de différentes langues aborigènes. Par exemple, dans la langue dharug, parlée autour de l’actuelle ville de Sydney, le mot « ganguroo » désigne un grand marsupial, tandis que dans la langue yuwaalaraay, le terme « gungurru » fait référence à un petit kangourou. Il est donc possible que le mot « kangourou » soit le fruit d’un mélange entre ces différentes appellations autochtones.

Le kangourou dans les traditions et les mythes aborigènes

Avant d’être adopté et popularisé par les Européens, le kangourou était déjà un animal central dans les croyances et les récits des peuples aborigènes d’Australie.

  • Le kangourou comme totem : Chez de nombreux groupes aborigènes, le kangourou était considéré comme un totem, c’est-à-dire un animal protecteur et symbolique qui guidait et accompagnait les individus et les communautés tout au long de leur vie. En tant que totem, le kangourou était souvent associé à des valeurs de force, d’agilité et de résilience face aux épreuves.
  • Le kangourou dans les mythes de création : Le kangourou apparaît dans plusieurs mythes de création aborigènes, qui racontent comment cet animal aurait participé à la formation du monde et de ses paysages. Par exemple, dans la tradition des peuples kulin du sud-est de l’Australie, le kangourou est associé à la figure du « Bunjil », un être créateur qui aurait façonné les montagnes, les rivières et les forêts en sautant sur la Terre à la manière d’un kangourou. De manière similaire, chez les peuples yanyuwa du nord de l’Australie, le kangourou est lié au héros culturel « Karwadi », qui aurait créé les premiers êtres humains en les modelant à partir de la chair d’un kangourou.
  • Le kangourou dans l’art rupestre aborigène : Les représentations de kangourous sont fréquentes dans l’art rupestre aborigène, témoignant de l’importance de cet animal dans la culture et l’imaginaire des peuples autochtones. Ces peintures et gravures, réalisées sur les parois des grottes et des abris-sous-roche, évoquent souvent des scènes de chasse ou des récits mythologiques mettant en scène des kangourous.

L’adoption du nom « kangourou » par les Européens et son évolution

Au cours des siècles qui ont suivi leur première rencontre avec le kangourou, les Européens ont progressivement assimilé et intégré ce terme dans leur propre langue et culture.

  1. L’entrée du mot « kangourou » dans les dictionnaires européens : Le nom « kangourou » a fait son apparition dans les dictionnaires européens dès le début du 19e siècle, notamment grâce aux nombreux récits de voyage et aux descriptions naturalistes qui circulaient à l’époque. Ainsi, le Dictionnaire de l’Académie française enregistre pour la première fois le terme « kangourou » en 1798, sous la forme « kanguroo », avant de l’orthographier « kangourou » dans l’édition de 1835. De même, le célèbre lexicographe britannique Samuel Johnson inclut le mot « kangaroo » dans son dictionnaire de 1828, définissant cet animal comme « un quadrupède sauteur de la Nouvelle-Hollande (Australie) ».
  2. La popularisation du kangourou dans la littérature et l’imaginaire européens : Le kangourou a rapidement suscité la curiosité et l’engouement des Européens, qui l’ont représenté et évoqué dans de nombreux ouvrages, allant des récits de voyage aux romans d’aventure en passant par les poèmes et les fables. Ainsi, dès 1802, le poète français Chateaubriand mentionne le kangourou dans son récit « Le génie du christianisme », décrivant cet animal comme « un être étrange, mi-lièvre et mi-cheval ». De même, l’écrivain britannique Lewis Carroll met en scène un kangourou dans son célèbre poème « La chasse au Snark » (1876), tandis que l’auteur australien Henry Lawson consacre plusieurs de ses nouvelles aux aventures de ces marsupiaux.
  3. Le rôle du kangourou dans la construction de l’identité nationale australienne : Au fil des siècles, le kangourou est devenu un véritable symbole national pour l’Australie, représentant à la fois la singularité de sa faune et la fierté de son peuple. Ainsi, en 1908, le kangourou est choisi pour figurer sur les armoiries de la jeune nation australienne, aux côtés de l’émeu, un autre animal endémique du pays. De même, le kangourou est présent sur la monnaie australienne, apparaissant notamment sur les pièces de 1 dollar depuis 1984. Enfin, le kangourou est souvent utilisé comme emblème par les équipes sportives et les organisations australiennes, reflétant ainsi l’attachement du peuple australien à cet animal symbolique.

Le kangourou aujourd’hui : entre enjeux écologiques et culturels

De nos jours, le kangourou continue de susciter l’intérêt et la fascination du public, tout en étant au cœur de nombreux débats et enjeux qui touchent à la fois à la protection de l’environnement et à la préservation des cultures aborigènes.

  • La conservation des espèces de kangourous : Les kangourous sont confrontés à plusieurs menaces qui pèsent sur leur survie et leur habitat, telles que la destruction des forêts, le changement climatique ou encore la concurrence avec les espèces animales introduites par l’homme, comme les lapins et les chèvres. Face à ces défis, plusieurs organisations environnementales et gouvernementales mènent des actions de conservation et de restauration des populations de kangourous, notamment en protégeant leurs habitats et en régulant la chasse et le commerce des produits dérivés.
  • Le rôle du kangourou dans la revitalisation des langues et des cultures aborigènes : Parmi les peuples aborigènes d’Australie, le kangourou demeure un élément important de la culture, des traditions et de l’identité. Dans ce contexte, plusieurs projets et initiatives visent à préserver et à valoriser le savoir-faire et les connaissances liés au kangourou, notamment en matière d’art, de médecine ou de spiritualité. Par exemple, des programmes de formation et d’éducation permettent aux jeunes générations aborigènes d’apprendre les techniques de chasse et de préparation du kangourou, tandis que des expositions et des festivals mettent à l’honneur les œuvres d’art et les récits inspirés de cet animal.
  • Le kangourou comme source d’inspiration et d’innovation : Enfin, le kangourou continue de fasciner et d’inspirer les artistes, les chercheurs et les entrepreneurs du monde entier, qui puisent dans la biologie et le comportement de cet animal des idées et des solutions pour résoudre des problèmes variés, allant de la conception de véhicules plus performants et écologiques à la création de vêtements et d’accessoires adaptés aux besoins et aux contraintes de la vie moderne.

Le nom « kangourou » est le reflet d’une histoire riche et complexe, qui puise ses racines dans les langues et les cultures aborigènes d’Australie et qui s’est enrichie au fil des siècles grâce aux échanges et aux découvertes entre les peuples et les continents. Aujourd’hui, le kangourou demeure un symbole fort de l’Australie, incarnant à la fois la singularité de sa faune et la diversité de son patrimoine culturel, et offrant un exemple fascinant de la manière dont les mots et les noms peuvent traverser les frontières et les époques pour devenir les témoins et les vecteurs d’une identité partagée.

Le kangourou est donc bien plus qu’un simple animal sauteur aux grandes oreilles : c’est une icône culturelle, un emblème national, et un véritable ambassadeur de l’Australie dans le monde entier. En comprenant les origines et les significations de son nom, nous pouvons mieux appréhender l’histoire et les enjeux qui entourent cet animal exceptionnel, et ainsi contribuer à préserver et à valoriser les richesses de notre patrimoine naturel et culturel commun.

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